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Top 10 de tous les temps en salle : 30 athlètes ont fait bouger les classements


Par Denis Poulet 

Malgré la saison écourtée, 30 athlètes ont fait bouger les classements du top 10 de tous les temps en salle. C’est exactement le même nombre que l’an dernier, mais c’est peut-être mieux puisqu’on suppose que d’autres auraient pu se faire valoir dans les compétitions qui ont été annulées en mars.

Comme d’habitude, les femmes se sont davantage distinguées que les hommes, car on en compte 17 contre 13 athlètes masculins. Il y avait eu plusieurs nouveaux venus en 2018-2019, on a aussi beaucoup cette année. Chez les hommes, 11 s’inscrivaient pour la première fois dans le classement d’une épreuve, alors qu’il y en a 7 chez les femmes.

Le demi-fond québécois s’éclate à Boston

C’est à Boston, plus précisément sur la piste « rapide » de l’Université du même nom, que les coureurs et coureuses québécois ont le plus progressé dans le top 10. Nos représentants ont participé à quatre compétitions relevées là-bas, certains et certaines en ont même profité pour battre des records du Québec.

Ainsi le classement masculin du 800 mètres a-t-il été passablement chamboulé. Mohand Zine Khelaf (CSLS) a consolidé sa 1re place dans le top 10 en portant son record du Québec à 1:48,84 le 15 février au David Hemery Valentine Invitational; Khelaf a remporté cette course relevée, où les sept premiers ont fini en dessous de 1:50. Parmi ceux-ci, il y avait Olivier Desmeules (CAUL), qui s’est classé 6e en 1:49,70; cette performance l’a fait apparaître au 2e rang de tous les temps, alors qu’il n’était même pas dans le classement auparavant. Vincent Duguay (CAUL) a lui aussi amélioré son record personnel dans la même épreuve, se classant 8e en 1:50,01; il est cependant resté au 3e rang du top 10. Toujours dans la même course, on retrouve Zakary Mama-Yary (CSLS), 15e à 1:51,21, ce qui l’a fait surgir à la 5e place du top 10, et Sebastian Saville (OTTL), 14e à 1:51,21.

Saville représentait en fait l’Université Laval à Boston, mais était encore membre des Ottawa Lions. Félix-Antoine Lapointe est son entraîneur depuis qu’il est arrivé à Québec en janvier 2020. Ce bon coureur de demi-fond, qui a eu 26 ans le 8 mars, est maintenant membre du CAUL.

Desmeules et Duguay se sont également fait valoir au 600 mètres. Le 7 décembre à Boston, au Sharon Colyear-Danville Season Opener, Desmeules a remporté l’épreuve en 1:18,72. Ce temps l’a fait apparaître à la 6e place du top 10, alors qu’il n’était pas dans ce classement l’an dernier. Duguay s’est classé 3e dans cette course, en 1:18,99, un temps bon pour la 7e place du top 10.

Autre coureur de demi-fond qui s’est distingué sur la piste de l’Université de Boston, Jean-Simon Desgagnés (CAUL), auteur d’un chrono de 7:53,21 au 3000 m le 15 février. Même s’il n’a terminé que 18e (la concurrence était féroce), Desgagnés battait le record du Québec de l’épreuve (7:53,99 par Charles Philibert-Thiboutot en 2015), et se hissait au 1er rang du top 10. On voit aussi Thomas Fafard (CAUL) dans ce classement, surgi à la 4e place en vertu de son chrono de 7:56,99 dans la même course.

Signalons que Desgagnés a fait également son apparition dans le top 10 du 1500 mètres (10e), grâce à son chrono de 3:50,0 le 22 février à Québec. De son côté, Fafard s’est hissé au 3e rang du top 10 du 5000 m en vertu de son temps de 13:57,77 le 7 décembre à Boston. Dans la même course, Charles Philibert-Thiboutot (CAUL) a battu le record du Québec en 13:30,79 (Alain Bordeleau détenait le record, à 13:56,59, depuis 1986). C’était pour Charles un retour prometteur en compétition après une saison gâchée par une blessure au pied droit, mais notre meilleur coureur s’est blessé de nouveau au mollet gauche en faisant du jogging le 3 janvier à Vancouver. Sa performance de Boston démontre néanmoins qu’il est loin d’être en déclin et que, en raison du report des Jeux olympiques de Tokyo à 2021, il peut toujours garder espoir de retrouver sa place au sein de l’équipe nationale.

Le 15 février, toujours à Boston, Kevin Robertson (CSLS) est devenu le deuxième coureur québécois de l’histoire à franchir le cap des 4 minutes au mille en salle. Il a retranché plus de 4 secondes à son meilleur résultat antérieur pour se classer 10e de la course (oui, 10 coureurs à moins de 4 minutes) en 3:59,85. Seul Philibert-Thiboutot a déjà fait mieux (3:55,33) en 2017. Robertson a également fait son apparition au classement du 3000 mètres, où il se retrouve 6e par suite de sa performance de 8:03,83 le 21 décembre.  

Trois coureuses de demi-fond québécoises se sont fait valoir dans la capitale du Massachussets. Maïté Bouchard (SHER) y a le plus impressionné en améliorant son record du Québec du 800 mètres à trois reprises : 2:02,69 le 24 janvier (2e au John Thomas Terrier Classic), 2:01,33 le 14 février (4e au David Hemery Valentine International), puis 2:00,93 le 28 février (1re au Last Chance Meet). Bouchard a ainsi réalisé trois des quatre meilleures performances canadiennes de l’année (1re, 3e et 4e).

Laurence Côté (CAUL) a épaté, elle aussi. Le 24 janvier, elle battait le record du Québec du 1000 mètres de Christine Slythe, qui remontait à 1985, en se classant 3e en 2:40,26, soit près d’une seconde de mieux que le record. Puis, le 28 février, elle portait ce record à 2:38,77, terminant 2e de l’épreuve. C’était aussi la 2e performance canadienne de l’année.

Autre coureuse qui a excellé de l’autre côté de la frontière, Simone Plourde (CSLS). En se classant 7e du mille le 24 janvier, elle faisait une apparition inattendue dans le top 10 québécois, et presque au sommet. Son chrono de 4:42,05 la place en effet au 2e rang, à moins de 5 secondes du record d’Annie Leblanc (4:36,61 en 2016).

À noter que 7 des 11 athlètes mentionnés sont du Club athlétique de l’Université Laval. Elle est là, notre pépinière de demi-fond.

Stiverne et Powell bousculent les classements en sprint

Dans les sprints féminins, on ne peut que souligner le brio d’Aiyanna-Brigitte Stiverne (ZIND) et de Micha Powell (ZIND). Stiverne a délogé Kimberly Hyacinthe du 1er rang du 200 mètres en vertu d’un excellent chrono de 23,78 le 25 janvier à Birmingham, en Alabama. Hyacinthe conserve cependant le record du Québec (23,79 en 2011), car Stiverne n’est pas admissible aux records du Québec, n’y résidant pas et n’ayant pas de carte d’assurance-maladie de la province. Stiverne s’est d’autre part glissée dans le top 10 du 60 mètres grâce à un temps de 7,47 le 18 janvier à Nashville, au Tennessee; elle occupe le 10e rang, sur un pied d’égalité avec Farah Jacques.

De son côté, Micha Powell, fille de Rosey Edeh et du recordman du monde Mike Powell, est entrée dans les classements au 200 mètres, au 300 mètres et au 400 mètres, avec des performances respectives de 24,29 (5e), 39,04 (10e) et 53,79 (5e); ses résultats au 200 et au 400 ont été réalisés à Boston, celui au 300 à Toronto. Originaire de l’Ontario, Powell est affiliée à la FQA depuis 2018.

Autres belles progressions

Audrey Leduc (GATI) n’a pas amélioré son rang au 60 mètres, demeurant 9e, mais elle a tout de même porté son PB de 7,47 à 7,44. Il faut davantage souligner sa progression au saut en longueur où, en atteignant 6 mètres le 22 février à Québec, elle a fait son apparition au 6e rang du top 10, y rejoignant Magali Roche et Émanuelle Massé.

Jade Bouchard-Nguyen (CSLS) n’était pas dans les classements l’an dernier, la voilà qui s’y retrouve dans deux épreuves. Au 600 mètres, son chrono de 1:30,35 le 25 janvier au McGill Team Challenge lui a valu d’apparaître au 5e rang. Au 1000 mètres, elle n’a terminé que 6e aux Championnats canadiens universitaires à Edmonton le 6 mars, alors qu’elle représentait l’Université de Montréal, mais son temps de 2:47,60 était assez bon pour lui valoir la 7e place au classement québécois de tous les temps.

Au 400 mètres, Audrey Jackson (CSLS) est passée de la 6e à la 4e place grâce à son résultat de 54,93 le 15 février à Boston. Et Farah Jacques (PFMX) a fait de même (de la 6e à la 4e) au 60 mètres haies en vertu d’un chrono de 8,33 le 31 janvier à Cambridge, aux États-Unis, temps qu’elle a amélioré encore de deux centièmes dans une compétition à Eaubonne, en France, le 17 février.

Maude Croteau-Vaillancourt (SHER) a progressé à la hauteur, ajoutant 1 cm à son record personnel (de 1,79 m à 1,80 m), ce qui lui a permis de passer de la 5e à la 2e place. Elles sont désormais cinq à avoir atteint le plateau du 1,80 m au cours de l’histoire.

Au marteau féminin, sans doute l’épreuve qui a connu le plus de mouvement au cours des dernières années, Ariane Dubois (CADL) a gagné un rang (de 4e à 3e) en raison d’un tir à 18,96 m le 22 février à Québec et Noémie Jeffrey (CAUL) s’est hissée de la 7e à la 5e place, résultat de son jet de 18,83 m dans la même compétition.

Pour clore cette analyse du côté féminin, signalons que Maude Léveillé (SHER) a réussi un PB de 3847 points aux Championnats canadiens universitaires le 5 mars à Edmonton. C’était 46 points de plus que son meilleur résultat antérieur, mais cette progression la laisse au 5e rang du top 10.

Chez les hommes, Stevens Dorcelus (TARS), qui occupe le 5e rang du top 10 en plein air au saut en longueur, n’avait pas encore accédé au top 10 en salle. C’est maintenant chose faite, résultat d’un bond de 7,54 m le 29 février à Bucarest, en Roumanie, qui lui a valu de se retrouver à la 8e place, tout juste derrière Bruny Surin. Dorcelus a terminé 3e du concours, auquel participait aussi son coéquipier Jesse Thibodeau, 6e à 7,22 m. Les deux Québécois étaient les seuls étrangers inscrits à ces Championnats en salle de la Roumanie.

On retiendra l’apparition de William Gagnon (CAUL) dans le classement du 300 mètres (10e à 34,37) et la progression de Maxime Léveillé (SHER) à la perche, de 8e à 6e, quand il a atteint les 5 mètres le 22 février à Québec; c’était 10 cm de plus que son PB antérieur.

À l’heptathlon, Alexander Stathis (CSLS) a gagné trois rangs (de 8e à 5e) en améliorant son score de 184 points le 22 février à Québec (de 4555 à 4739). Dans la même compétition, Antoine Bérubé (CSLS) a inscrit un PB de 4671 points, ce qui lui valait de se retrouver dans le top 10 pour la première fois (6e).

Encourageant, mais

Toutes ces belles prestations sont évidemment stimulantes pour l’athlétisme québécois. C’est un signe de dynamisme. On peut cependant s’inquiéter un peu du fait que tous ces athlètes en progression ne proviennent que d’un nombre très restreint de clubs et que rien n’a bougé dans plusieurs épreuves.

Dans les classements masculins, il ne s’est pratiquement rien passé dans les sprints et sur les haies, si ce n’est la performance de William Gagnon au 300 mètres mentionnée précédemment.Dans les concours, on ne relève aucun changement au saut en hauteur et au triple saut, et ce fut le calme plat dans les lancers.

Si les femmes ont causé plus de remue-ménage, il ne s’est rien passé au 1500 mètres, au 3000 mètres, au triple saut et au poids.

Le top 10 de tous les temps n’est cependant qu’un moyen d’évaluer la progression de l’athlétisme québécois. C’est un classement ouvert, où l’on retrouve surtout des séniors, la catégorie qui, au vu de certains autres indices (classements canadiens, sélections nationales, médailles aux Championnats, etc.), évolue le plus difficilement. Il y a néanmoins toujours lieu d’apprécier l’amélioration de nos meilleurs.